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Date de la soirée : 20 / 05 / 2003

Date de dernière modification : 14/01/2005

MISE AU POINT EN DIABETOLOGIE

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Données actualisées de l’UKPDS : 

implications pour la prise en charge des patients diabétiques de type 2

  Médecine thérapeutique / Endocrinologie. Volume 2, Numéro 3, 207-16, Mai - Juin 2000, REVUE : TRAITEMENT DU DIABETE DE TYPE 2

http://www.john-libbey-eurotext.fr/fr/revues/medecine/mte/e-docs/00/02/E6/62/article.md?fichier=images.htm

Auteur(s) : Philippe Chanson, José Timsit, Bernard Charbonnel,

Résumé : 

Les 12 et 13 juillet 1999 a été organisée à Oxford, à l’initiative des Laboratoires Lilly, une rencontre entre des médecins anglais impliqués dans l’UKPDS (United Kingdom prospective diabetes study) et des diabétologues français. Au cours de ce symposium informel et très interactif, R. Turner et son équipe ont présenté des résultats actualisés, inédits pour beaucoup, de l’UKPDS. Les milliers de patients suivis en moyenne 9,5 ans (et pour certains au-delà de 15 ans) ont fourni une somme d’informations dont l’analyse se poursuit. Il faut d’abord se rappeler les conditions dans lesquelles l’UKPDS a été conçue. En 1972 les résultats de l’étude UGDP (University group diabetes program) n’avaient pas montré de bénéfice sur la mortalité cardiovasculaire du traitement de l’hyperglycémie au cours du diabète de type 2 [1-3]. Comme on le sait, le traitement par les sulfamides hypoglycémiants ou la phenformine semblait même associé à une surmortalité cardiovasculaire. C’est dans ce contexte que l’UKPDS a démarré en 1976, l’inclusion des patients s’étant poursuivie jusqu’en 1991 et l’analyse des données ayant commencé en 1997. La principale question, posée à travers l’étude d’intervention que chacun connaît, est de savoir si un traitement dit intensif du diabète de type 2, visant à réduire durablement le niveau d’hyperglycémie, est plus efficace qu’un traitement conventionnel pour réduire la survenue des complications du diabète. Sur cette question s’y sont greffées plusieurs autres : quel est le type de traitement le plus efficace, quels sont les effets du traitement de l’hypertension artérielle (HTA), quel est le traitement le plus efficace de l’HTA ? Les résultats de ces analyses ont été publiés, décrivant d’abord la population de l’étude ou les effets du régime initial [4-11], puis, à partir de 1998, rapportant les effets de l’étude d’intervention [12-24]. Ils ont aussi été amplement commentés [25-27]. Plus récemment, l’analyse dite épidémiologique, portant sur l’ensemble des patients (quel que soit leur traitement), a fourni de précieuses données sur les rôles respectifs de l’hyperglycémie, de l’HTA, de l’hyperlipidémie et sur l’interaction éventuelle de ces facteurs de risque dans la survenue des complications. Ces résultats ont été présentés en partie aux congrès de l’EASD (European association for the study of diabetes) et de l’ADA (American diabetes association) mais n’ont pas encore été publiés. La comparaison des résultats de l’étude épidémiologique et de l’étude d’intervention est particulièrement intéressante puisque les deux analyses ont été effectuées dans la même population et sur la même durée : l’UKPDS donne donc, en grandeur réelle, la possibilité de vérifier si une étude épidémiologique d’observation est prédictive des résultats de l’intervention thérapeutique.

  ARTICLE :

Epidémiologie des complications

Il est important de rappeler que l'UKPDS concernait des patients chez qui le diagnostic de diabète venait d'être établi (sur le critère, quasi-prémonitoire, d'une glycémie à jeun >= 6,1 mmol/L à deux occasions) et que ces sujets avaient, en moyenne, 53 ans à l'entrée dans l'étude. À 12 ans de suivi, 12,8 % des patients ont fait un infarctus du myocarde (IDM), 4,2 % un accident vasculaire cérébral (AVC), 2,7 % une insuffisance cardiaque sans cause ischémique reconnue. Encore faut-il souligner que ces chiffres sous-estiment la fréquence des accidents coronariens puisque les patients de plus de 65 ans et ceux qui avaient eu une manifestation clinique de macroangiopathie dans l'année précédente ne pouvaient être inclus dans l'UKPDS. Parallèlement 7,9 % des patients ont eu besoin d'une photocoagulation rétinienne (quelle qu'en soit l'étendue). Il faut savoir qu'une photocoagulation rétinienne, même peu étendue, était vécue comme une perte de santé par les patients, retentissant sur les scores de dépression dans les questionnaires. Une intervention pour cataracte a été réalisée chez 5 % des patients et 0,7 % des patients ont développé une insuffisance rénale. Enfin, 1,1 % des patients ont subi une amputation. Au bout du compte, sur ces douze ans de suivi, une complication au moins est survenue, en plus de celles déjà présentes à l'entrée dans l'étude, chez 30 % des patients.
Dans les 10 premières années suivant le diagnostic de diabète de type 2, ce sont les complications de la macroangiopathie qui prédominent. Dix ans après le diagnostic de diabète 22 % des patients ont eu au moins une complication de macroangiopathie (IDM, angor ou AVC) contre 12 % seulement une complication de microangiopathie. Cette macroangiopathie est responsable d'une surmortalité. En effet, l'incidence de la mortalité, toutes causes confondues, est de l'ordre de 14,5 pour 1000 patients-années : 57 % de ces décès sont de cause cardiovasculaire, 24 % sont en rapport avec un cancer et 0,2 % seulement sont en rapport avec une insuffisance rénale. Au total, ce sont 8 % des patients qui sont décédés d'un infarctus du myocarde ou d'un accident vasculaire cérébral à 10 ans (soit 2 à 3 fois plus que dans la population générale) et, au 13 juillet 1999, sur les 5102 patients qui avaient été recrutés dans l'UKPDS, toutes causes confondues, 1114 étaient décédés.
Dans l'UKPDS ont été étudiés les rôles respectifs des niveaux de la glycémie et de la pression artérielle dans la survenue des complications. Les relations entre ces paramètres et l'incidence des complications ont été analysées pour répondre aux questions suivantes :
- existe-t-il un effet-seuil (en-deçà duquel le sujet est protégé, ou au contraire au-delà duquel le risque n'augmente plus) ou ces relations sont-elles continues ?
- ces relations sont-elles identiques pour chaque type de complication ?

1. Rôle de l'hyperglycémie dans la survenue des complications du diabète de type 2
2. Rôle de la pression artérielle systolique
3. Interaction hémoglobine glyquée ­ pression artérielle systolique
4. Complications et glycémie
5. Complications et pression artérielle systolique
6. Aspects spécifiques de certaines complications 
   Maladie vasculaire périphérique
   Rétinopathie diabétique
   Néphropathie dans le diabète de type 2
7. Facteurs de risque cardiovasculaire, rôle des lipides  
   Les données épidémiologiques de l'UKPDS
   Les effets du traitement
8. Quelles conséquences tirer de l'UKPDS en termes de stratégie thérapeutique ?

 

Rôle de l'hyperglycémie dans la survenue des complications du diabète de type 2

Le rôle de l'hyperglycémie a été analysé en corrélant l'incidence des complications à l'hémoglobine glyquée moyenne, arrêtée au moment de l'étude (up-dated HbA1c). Cette up-dated HbA1c est la moyenne des HbA1c enregistrées pour chaque patient du début de l'étude jusqu'au moment de l'analyse. Rappelons que les résultats publiés jusqu'ici ne concernaient que l'HbA1c à l'entrée dans l'étude.
Ainsi, l'incidence des complications quelles qu'elles soient (any diabetes-related endpoint ou toutes complications, 1255 événements au moment de l'analyse) passe d'un peu moins de 40 pour 1000 patients-années pour une HbA1c moyenne normale (limite supérieure 6,2%), à 120 pour 1000 patients-années pour une HbA1c de l'ordre de 10 à 11 % . (
Figure 1)

Figure 1. 

augmentation de l'incidence des complications liées au diabète, quelles qu'elles soient, exprimée en événements par 1000 patients-années (E/1000 PA), en fonction de l' HbA1c (up-dated HbA1c), au cours de l'UKPDS.

Entre ces deux bornes, l'augmentation du risque est quasi linéaire : il n'y a donc pas, pour l'ensemble des complications du diabète de type 2, d'effet seuil.
Lorsque la relation incidence des complications-HbA1c est analysée en fonction du type de complication, des différences apparaissent.
(Figure 2)

Figure 2. 

Augmentation de l'incidence des complications microvasculaires et de l'infarctus du myocarde, exprimées en événements par 1000 patients-années (E/1000 PA), en fonction de l' HbA1c (up-dated HbA1c), au cours de l'UKPDS.

 

Si l'augmentation de l'incidence des complications microvasculaires en fonction de l'HbA1c est exponentielle, quasi superposable à celle rapportée dans le DCCT (Diabetes control and complications trial) [28, 29], l'augmentation de l'incidence de l'infarctus du myocarde est pratiquement linéaire. On peut aussi noter l'absence d' influence de l'obésité sur cette relation. 

Rôle de la pression artérielle systolique

Les conditions dans lesquelles l'étude du contrôle de la pression artérielle s'était greffée sur celle du contrôle glycémique doivent être rappelées. A l'entrée, 39 % des patients avaient une hypertension artérielle. Parmi les sujets dont la pression artérielle était >= 160 mmHg pour la systolique et/ou >= 90 mmHg pour la diastolique, 727 n'étaient pas traités ; parmi les sujets ayant une pression artérielle supérieure à 150 et/ou 85 mmHg, 421 étaient traités. Ces chiffres soulignent la fréquence de l'hypertension artérielle dans la population diabétique, le fait qu'elle est souvent négligée et que lorsque les traitements sont prescrits, ils sont souvent inefficaces.
Pour les complications prises dans leur ensemble le risque passe de 1 à 3 lorsque la pression artérielle systolique moyenne cumulée passe de 110 à 170 mmHg. L'augmentation est quasi linéaire. Il n'y a donc pas non plus d'effet seuil de la pression artérielle systolique sur l'augmentation de la fréquence des complications. Une augmentation de l'incidence des complications est observée pour des valeurs de la pression artérielle systolique encore normales : il n'y a donc pas de relation de type courbe en U ou en J pour les complications prises dans leur ensemble.
Comme indiqué sur la Figure 3,

Figure 3. 

Augmentation de l'incidence des complications microvasculaires et de l'infarctus du myocarde, exprimées en événements par 1000 patients-années (E/1000 PA), en fonction de la pression artérielle systolique (PAS cumulée), au cours de l'UKPDS.

 

 l'analyse de l'incidence des complications en fonction de la pression artérielle systolique, montre, mais à des niveaux différents, une augmentation des complications de macroangiopathie et des complications microvasculaires. Si l'on analyse cette courbe dans la zone des pressions artérielles les plus basses, on constate que la normalisation stricte de la pression artérielle seule ne peut suffire à réduire totalement l'excès de risque d'infarctus du myocarde (ou d'accident vasculaire cérébral) chez les patients diabétiques de type 2. Si l'élévation de la pression artérielle systolique joue un rôle aggravant, elle ne suffit donc pas à expliquer, à elle seule, l'excès de complications.
L'analyse du rôle de la pression artérielle diastolique est en cours.

Interaction hémoglobine glyquée ­ pression artérielle systolique

Pour les complications et événements liés au diabète pris dans leur ensemble, il existe une interaction nette, linéaire et synergique des deux facteurs de risque. Ainsi, si le risque est fixé à 1 pour une hémoglobine glyquée inférieure à 6 % et une pression artérielle systolique inférieure à 130 mmHg, ce risque passe à environ 5 lorsque l'hémoglobine glyquée est supérieure à 8 % et la pression artérielle systolique supérieure à 150 mmHg (situation dont il faut bien convenir qu'elle est fréquente en pratique clinique (Figure 4). 

Figure 4. 

Risque relatif (hazard ratio) de survenue des complications liées au diabète, quelles qu'elles soient, en fonction de l'Hb A1c d'une part et de la pression artérielle systolique, d'autre part, au cours de l'UKPDS

 

En ce qui concerne les complications microvasculaires, l'effet de l'hyperglycémie semble beaucoup plus fort que celui de la pression artérielle : le risque relatif est de l'ordre de 15 pour une HbA1c supérieure à 8 % (vs HbA1c inférieure à 6 %) alors qu'il augmente de façon beaucoup plus modeste entre 130 et 150 de pression artérielle systolique. Chez les patients dont l'HbA1c est supérieure à 8 % la différence de risque relatif selon le niveau de pression artérielle systolique est très faible. La seule normalisation de la pression artérielle est insuffisante pour éviter l'apparition des complications microvasculaires.

Les bénéfices du traitement prédits par les études épidémiologiques sont-ils vérifiés par les études d'intervention ?

L'existence d'une association statistique entre l'HbA1c, par exemple, et l'incidence des complications ne permet pas d'établir un lien de causalité entre les deux paramètres. Seule l'étude d'intervention permet de démontrer un tel lien. La comparaison des deux types d'analyse des résultats de l'UKPDS, données épidémiologiques d'une part et données d'intervention d'autre part, permet de valider, a posteriori, le modèle épidémiologique de survenue des complications et de vérifier si ce qui est théoriquement prédit par l'épidémiologie est réellement obtenu grâce aux traitements. Cette comparaison renforce les messages et les recommandations sur les traitements, elle peut être l'occasion de mettre en évidence des effets pervers inattendus des traitements, elle permet de suspecter des effets liés à la classe de tel ou tel médicament.

Complications et glycémie

Les résultats de l'étude d'intervention

Les résultats publiés de l'UKPDS montrent qu'une baisse de 0,9 % de l'hémoglobine glyquée moyenne sur 10 ans (7,0 % dans le groupe intensif vs 7,9 % dans le groupe conventionnel) est associée à une réduction significative des différentes complications (Tableau 1).



Risque relatif des différentes complications selon la moyenne d'hémoglobine glyquée d'après l'étude épidémiologique

Pour l'ensemble des complications, la courbe est linéaire (Figure 1) ce qui permet donc de calculer qu'une baisse de 1 % d'hémoglobine glyquée devrait correspondre à une diminution du risque de 21 %. Dans l'étude d'intervention, pour une réduction de 0,9 % d'hémoglobine glyquée, c'est une réduction de 12 % des événements et des complications liés au diabète qui a été observée. Cette discordance n'a pas trouvé, pour l'instant d'explications. La comparaison des résultats obtenus pour chaque classe de complications est indiquée dans le Tableau 2 :


Complications et pression artérielle systolique

Sur les 4209 patients randomisés initialement, 1148 ont été ensuite inclus dans l'étude du traitement de l'hypertension. Dans cette population de 1148 patients, la randomisation a constitué 3 groupes : contrôle (n = 390), inhibiteur de l'enzyme de conversion (IEC) (n = 400) et beta-bloqueurs (n = 358). Sur la durée de suivi de 9 ans, la pression artérielle dans les groupes traités (quel que soit le traitement) a été réduite de 10 mmHg pour la pression artérielle systolique et de 5 mmHg pour la pression artérielle diastolique.
Le Tableau 3 permet de comparer l'effet de la réduction de 10 mmHg de la pression artérielle systolique obtenue dans l'étude d'intervention aux résultats prédits dans l'étude épidémiologique.


Il faut souligner que très peu de patients sont restés en monothérapie. Il a fallu au moins deux médicaments anti-hypertenseurs chez 40 % des patients du groupe traitement moins strict. Aucun des patients du groupe contrôle strict de la pression artérielle n'a pu se satisfaire d'un seul anti-hypertenseur.
Le type du traitement anti-hypertenseur n'influence pas l'effet bénéfique : les beta-bloqueurs sont aussi efficaces que les IEC, mais l'observance du traitement est meilleure avec les IEC qu'avec les beta-bloqueurs (22 % de patients non adhérents sous IEC, vs 35 % sous beta-bloqueurs, p < 0,001).

En conclusion, pour toutes les complications, la réduction de l'hémoglobine glyquée observée dans l'étude d'intervention correspondait approximativement à l'effet attendu à partir de l'analyse épidémiologique.
En revanche, l'effet de la baisse de la pression artérielle obtenu dans l'étude d'intervention apparaît toujours supérieur à l'effet attendu à partir de l'étude épidémiologique (Tableau 3).

 Plusieurs explications peuvent être proposées pour cette discordance. Un effet propre (bénéfique) des médicaments utilisés dans le traitement de l'hypertension artérielle (beta-bloqueurs et IEC) a été évoqué. Les effets bénéfiques du traitement de l'HTA peuvent sembler, en première analyse, supérieurs à ceux du traitement de l'hyperglycémie. Il peut cependant s'agir d'un biais épidémiologique : par définition l'étude d'intervention a porté sur un sous-groupe (celui des diabétiques hypertendus) à haut risque de complications, c'est-à-dire dans une zone de risque où l'effet des traitements pourrait être très supérieur à ce qu'il aurait été dans une zone de pression artérielle plus faible. Enfin, l'étude d'intervention sur la pression artérielle a commencé chez des sujets plus vieux de 2 à 3 ans (car elle a été programmée secondairement) et qui avaient donc probablement plus de facteurs de risque cardiovasculaire (en particulier le BMI était de 29, donc au-dessus de celui de la population globale initiale). Il faut donc rester prudent quant aux spéculations faites à partir de la comparaison des deux études.

Aspects spécifiques de certaines complications

Maladie vasculaire périphérique

Peu de données ont été, à l'heure actuelle, publiées sur les facteurs de risque de la maladie vasculaire périphérique chez les diabétiques. Un pour cent des patients avaient une maladie vasculaire périphérique clinique à l'entrée dans l'étude. Ce chiffre est passé à 12 % après 18 ans de suivi. L'étude a permis d'identifier de nombreux facteurs de risque : âge, ethnie (afro-caribéenne), tabac (risque X 3,5), index de masse corporelle, glycémie à jeun, hémoglobine glyquée (14 % d'augmentation du risque pour 1% d'augmentation de l'HbA1c), cholestérol total, LDL-cholestérol, HDL-cholestérol, triglycérides, leucocytose élevée, existence d'une albuminurie, vitesse de sédimentation (> 13 mm vs < 5 mm). En revanche, la pression artérielle systolique n'apparaît pas comme un facteur de risque déterminant dans la survenue d'une maladie vasculaire périphérique dans cette étude. Il est donc possible d'identifier précocement les patients à risque de maladie vasculaire périphérique.
Enfin, dans l'UKPDS la maladie vasculaire périphérique est apparue comme un facteur de risque d'amputation beaucoup plus fort que la neuropathie périphérique.

Rétinopathie diabétique

Toute l'analyse de la rétinopathie diabétique dans l'UKPDS a été faite à partir d'examens réalisés à l'entrée puis tous les 3 ans, comportant 4 photographies du fond d'œil avec une lecture centralisée utilisant la classification de l'EDTRS [30].
Toutes formes de rétinopathie confondues (au moins un microanévrysme), il existe une augmentation linéaire de la prévalence de la rétinopathie qui passe de 37 % à l'entrée à 70 % à 12 ans. Douze pour cent des patients, au terme de 12 ans, ont nécessité une photocoagulation au laser ou ont eu une hémorragie intra-vitréenne.

Effets du contrôle glycémique

L'obtention d'un meilleur contrôle glycémique (HbA1c 7 vs 7,9 %) a réduit le risque d'avoir besoin d'une photocoagulation rétinienne (risque relatif 0,71, p = 0,0031) et de subir l'extraction d'une cataracte (risque relatif = 0,76, p = 0,046). La réduction du risque de survenue d'une hémorragie intra-vitréenne et de cécité d'un œil n'atteint pas la significativité.
Une progression d'au moins 2 stades de la rétinopathie diabétique est prévenue par le traitement intensif comme indiqué dans le Tableau 4

A 12 ans, le risque absolu est réduit de 48,7 à 38,6 événements pour 1000 patients-années.

Effets du contrôle de la pression artérielle systolique

Le contrôle strict de la pression artérielle systolique (10 mmHg de moins, en moyenne, que dans le groupe contrôle moins strict) réduit le risque de microangiopathie (toutes formes confondues) de 37 %. Le risque relatif de recours au laser est de 0,65. La réduction du risque d'hémorragie intravitréenne, de cécité et d'intervention pour cataracte n'est pas significative.
En revanche la réduction du risque de progresssion de deux stades au moins de la rétinopathie à 4,5 ans (RR = 0,75) et à 7,5 ans (RR = 0,66) et de détérioration de la vision à 7,5 ans (RR = 0,53) est sensible dans le groupe contrôle strict.

Données de l'étude épidémiologique

Pour une baisse de 1 % de l'HbA1c est attendue une réduction de 42 % des hémorragies vitréennes, de 37 % du recours au laser et de 19 % des interventions pour cataracte, donc très proche de l'effet réellement observé dans l'étude thérapeutique.
La réduction de la pression artérielle systolique de 10 mmHg fait escompter une baisse du recours au laser de 11 %. Il n'y a en revanche aucune relation entre pression artérielle et hémorragie du vitré ou chirurgie de la cataracte.

Effets combinés du temps, de l'équilibre glycémique et de la pression artérielle systolique

Comme dans le diabète de type 1 la rétinopathie progresse avec l'ancienneté du diabète. Le niveau moyen d'HbA1c influence le taux de progression (Figure 5). 

Figure 5. 

Pourcentage de patients diabétiques ayant aggravé leur rétinopathie d'au moins 2 stades ETDRS, en fonction du temps et de l'HbA1c, au cours de l'UKPDS

A douze ans, 20 % des patients dont l'HbA1c est restée inférieure à 6 % ont vu progresser leur rétinopathie d'au moins 2 stades EDTRS, contre 80 % des patients dont l'HbA1c était supérieure à 9 %.
Ce taux de progression est également majoré par l'augmentation de la pression artérielle systolique.
D'autres facteurs de risque de progression ont été identifiés dans l'étude : faible insulinosécrétion, faible sensibilité à l'insuline, LDL cholestérol élevé, âge élevé.
Enfin le stade de la rétinopathie à l'entrée était prédictif du risque de recours au laser à 12 ans : de l'ordre de 5 % chez les patients n'ayant aucun microanévrisme au premier examen, il est de 10 % chez ceux ayant initialement un microanévrisme et passe à 35 % chez les patients ayant à l'entrée une rétinopathie de stade 35 ou plus.

Néphropathie dans le diabète de type 2

Si l'on connaît assez bien l'évolution naturelle de la néphropathie au cours du diabète de type 1, de nombreuses inconnues persistent quant à l'histoire naturelle de la néphropathie dans le diabète de type 2 [31]. Les caractéristiques, à l'entrée dans l'étude, de la population, étudiée ici de manière prospective, étaient les suivantes : âge moyen 52 ans, 60 % d'hommes, 82 % de caucasiens ; 35 % des patients étaient fumeurs ; après 3 mois de régime l'HbA1c était de 7,2 % et la pression artérielle était de 153-83 mmHg en moyenne. A l'entrée dans l'étude, 6,5 % des patients avaient une microalbuminurie pathologique définie par une concentration urinaire d'albumine comprise entre 50 et 300 mg/L ; 0,7 % des patients avaient une macroprotéinurie. L'insuffisance rénale était définie par une créatininémie supérieure à 175 mumol/l. L'étude a porté sur un suivi moyen de 9,5 années.
L'incidence annuelle des différents stades de la néphropathie diabétique a été faible. En effet, comme indiqué dans le Tableau 5, une faible proportion des patients passe chaque année d'un stade au suivant (taux de conversion).


L'incidence cumulée des différents stades de la néphropathie montre que, sur une durée de suivi de 9,5 années, le nombre des évènements néphrologiques cliniquement significatifs reste faible. En effet, à partir de la population initiale de ces patients dont le diabète était de diagnostic récent, 20 % des sujets (n = 953) ont développé une microalbuminurie, 4,7 % (n = 223) une macroalbuminurie, 1,4 % (n = 64) une insuffisance rénale chronique et 0,03 % (n = 13) sont morts des suites de la pathologie rénale. La probabilité d'être indemne de toute atteinte rénale au cours du diabète de type 2 est donc de 89 % à 5 ans, 81 % à 10 ans et 74 % à 15 ans. Il est intéressant de noter que dans cette population, et avec un recul de 9,5 ans, le taux de progression de la microalbuminurie à la macroprotéinurie est faible, de l'ordre de 25 %. Il faut cependant souligner qu'une importante proportion de ces sujets a bénéficié d'un traitement intensif de l'hyperglycémie et d'un contrôle strict de la pression artérielle. Il ne s'agit donc pas ici d'une histoire naturelle au sens strict.
Malgré le faible nombre d'évènements néphrologiques, l'étude thérapeutique a permis de montrer, à 9 et 12 ans, un bénéfice, sur la microalbuminurie, de l'intervention glycémique et de l'intervention tensionnelle, à la fois sur la pression artérielle systolique et sur la pression artérielle diastolique.

Facteurs de risque cardiovasculaire, rôle des lipides

Les données épidémiologiques de l'UKPDS

Dans les dix premières années de suivi, 22 % des patients ont développé au moins une complication de macroangiopathie, infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral ou angor et 8 % sont morts d'infarctus ou d'accident vasculaire cérébral. La mortalité globale de 10 % à 10 ans est environ 2 à 3 fois plus élevée que celle de la population générale comparable. Cinquante-neuf pour cent de cette mortalité est liée aux seuls infarctus du myocarde.
A partir de l'étude portant sur 2693 patients et 280 événements coronariens, des facteurs de risque ont été clairement identifiés : certains ne sont pas modifiables comme l'âge et le sexe, d'autres le sont potentiellement: tabagisme, augmentation du LDL cholestérol, baisse du HDL-cholestérol, augmentation de l'HbA1c et augmentation de la pression artérielle systolique. L'existence d'une rétinopathie ne constitue pas un facteur de risque mais la présence d'une microalbuminurie, contrairement à ce qui avait été initialement publié, constitue bien un marqueur de ce risque.
Le traitement intensif de l'hyperglycémie a réduit l'incidence de l'infarctus du myocarde de 16 % (14 % de réduction du risque pour 1 % de moins d'HbA1c dans l'analyse épidémiologique). L'effet de la réduction de la pression artérielle a été plus net : réduction de 21 % des infarctus du myocarde (13 % pour 10 mmHg selon l'analyse épidémiologique).
L'effet des lipides est particulièrement intéressant également, même si l'intervention thérapeutique lipidique ne faisait pas partie des objectifs de l'UKPDS. Dans l'analyse des facteurs de risque initiaux, le LDL cholestérol et le HDL cholestérol sortent comme facteurs de risque en analyse multivariée. Les triglycérides sortaient en analyse univariée mais pas en analyse multivariée. Une augmentation du LDL cholestérol de 1 mmol/l augmente le risque cardiovasculaire de 57 %, une augmentation du HDL cholestérol de 0,1 mmol/l diminue le risque cardiovasculaire de 15 %.
La Figure 6 indique l'incidence de l'infarctus du myocarde en fonction du LDL cholestérol moyen sur la période de suivi (résultats non publiés). Soulignons à ce sujet que la dyslipidémie est beaucoup plus fréquente que l'hyperlipidémie et que l'on constate une augmentation considérable du risque dans des zones de LDL normal.

 

Figure 6. 

Incidence de l'infarctus du myocarde, exprimée en événements par 1000 patients-années (E/1000 PA), en fonction de la concentration moyenne de LDL-cholestérol, au cours de l'UKPDS.

 



Les effets du traitement

L'UKPDS ne comportait pas de politique particulière vis-à-vis des lipides. Le traitement de l'hyperglycémie, même avec la metformine, ou le traitement de l'hypertension artérielle (quelle que soit la classe thérapeutique) a eu très peu d'impact sur les lipides, aussi bien chez les obèses que chez les non-obèses. Ce n'est donc pas par l'intermédiaire d'effets sur les lipides que s'expliquent les bénéfices observés dans l'UKPDS et la dyslipidémie doit être traitée de façon indépendante. C'est ce qui a conduit les épidémiologistes d'Oxford à planifier l'étude LDS (Lipids diabetes study).
Le risque cardiovasculaire est plus élevé chez les sujets diabétiques à cholestérol bas que chez les sujets non diabétiques à cholestérol élevé. C'est ce qu'ont bien montré des études concernant des patients diabétiques et non-diabétiques (4S, WOSCOPS). Actuellement, quatre études de prévention primaire et/ou secondaire sont en cours qui comportent des patients diabétiques : deux testent l'efficacité du fénofibrate (DAIS et FIELD), deux d'une statine (HPS, simvastatine, et CARDS, atorvastatine).
Comme l'indique la Figure 7, 

 

Figure 7. 

La relation entre le risque relatif de maladie coronarienne et la concentration de cholestérol total chez les patients diabétiques est de même pente que dans la population générale mais décalée vers la droite (courbe " risque élevé "). On peut donc attendre une réduction de risque identique pour une baisse similaire du cholestérol mais à partir de niveaux de cholestérol beaucoup plus bas (dans la zone «normale»)

la relation entre le risque relatif de maladie coronarienne et la concentration de cholestérol total chez les patients diabétiques est de même pente que dans la population générale mais décalée vers la droite. On peut donc attendre une réduction de risque identique pour une baisse similaire du cholestérol mais à des niveaux de cholestérol beaucoup plus bas (dans la zone normale). L'étude LDS prévoit d'inclure 5000 diabétiques de type 2, de 40 à 75 ans suivis en ambulatoire et dont la concentration de cholestérol total est inférieure à 4,1 mmol/l et celle de triglycérides inférieure à 4,5 mmol/l. Ces patients seront répartis par tirage au sort en 4 groupes : cérivastatine 0,4 mg + fénofibrate 200 mg, placebo + fénofibrate 200 mg, cérivastatine 0,4 mg + placebo et enfin, placebo + placebo. Pour les investigateurs, l'association statine-fibrate ne semble pas comporter de risque particulier malgré la dose élevée de statine, à condition de séparer les prises des médicaments. Sont exclus les patients présentant une maladie cardiovasculaire clinique, une insuffisance rénale ou hépatique, une lithiase biliaire, une myopathie, un risque vital ou la possible survenue d'une grossesse.
Les patients seront suivis pendant au moins 5 ans. Les objectifs principaux qui seront analysés sont : survenue d'un infarctus mortel ou d'une mort subite, survenue d'un infarctus non mortel, nécessité d'une revascularisation artérielle, coronaire ou périphérique. Les objectifs secondaires analysés seront : la survenue d'un accident vasculaire cérébral, de syndrome coronaire, d'une insuffisance cardiaque, la mortalité de toute cause, la photocoagulation rétinienne, la survenue d'une insuffisance rénale. Cette étude analysera également l'évolution de la microalbuminurie, de l'électrocardiogramme et bien sûr des concentrations lipidiques ; elle comportera une analyse économique et de la qualité de vie.

Quelles conséquences tirer de l'UKPDS en termes de stratégie thérapeutique ?

L'un des grands mérites de l'UKPDS a été de démontrer que le diabète de type 2 est une maladie évolutive, dans laquelle une perte de fonction des cellules beta joue un rôle capital. Cette altération de l'insulinosécrétion est chiffrée, d'après l'étude, à 15 % en 6 ans environ et se produit à un rythme assez constant. Virtuellement, aucun patient (sauf MODY 2, par mutation du gène de la glucokinase) ne maintient sa fonction beta dans le temps, ce qui explique qu'une escalade thérapeutique est nécessaire, tous les 5 ans environ, pour maintenir l'HbA1c au niveau obtenu initialement sous régime seul.
En accord avec l'étude épidémiologique, les données de l'intervention ont montré l'absence de seuil dans la relation entre l'hémoglobine glyquée et la survenue des complications liées au diabète. L'objectif doit donc être d'obtenir une hémoglobine glyquée inférieure à 7 % et de maintenir ce résultat dans le temps. Une stratégie en trois étapes peut donc être proposée.

1ère étape. 

Elle consiste à recommander un régime et un changement de mode de vie. Ce régime doit comporter 50 % de glucides, 25 % de lipides (peu de graisses saturées), 25 % de protides. En trois mois, cette première étape a permis de diminuer l'hémoglobine glyquée de 9 à 7 % (Figure 8) et le poids de 3,6 kg en moyenne dans l'UKPDS.

 

Figure 8. 

Évolution de l'HbA1c, en fonction du temps, au long de l'étude UKPDS, dans le groupe « traitement conventionnel » et dans le groupe « traitement intensif ».



2ème étape. 

Sous régime seul, le maintien d'une hémoglobine glyquée inférieure à 7 % est illusoire chez la plupart des patients. Après la diminution initiale, l'HbA1c augmente progressivement et de façon parallèle dans les deux groupes (Figure 8). A 6 ans, la moitié des patients ne pouvait plus être traitée par le régime seul. Compte tenu des données de l'UKPDS, on peut recommander de débuter le traitement par la metformine à la fois pour ses effets métaboliques et pour son effet cardioprotecteur. Pour les auteurs de l'UKPDS, il n'y a pas de raison de réserver ce traitement en première intention aux seuls patients obèses, d'autant que dans l'UKPDS le bénéfice métabolique de la metformine, ajoutée aux sulfamides, était identique chez les sujets de poids normal (IMC < 25), en surpoids (IMC 25-27) ou obèses (IMC > 27) (résultats non publiés).
Les résultats obtenus avec la metformine méritent plusieurs commentaires. Chez les patients obèses le traitement par metformine a apporté un bénéfice par rapport aux autres traitements intensifs en terme de mortalité, sans pourtant qu'un effet particulier soit observé sur le contrôle glycémique ou lipidique. (Figure 9)

 

Figure 9. 

Proportion de patients en surpoids décédant d'une cause liée au diabète en fonction du type de traitement : conventionnel, intensif ou metformine, au cours du temps.

 

Ceci suggère un effet propre de la metformine qui pourrait passer par un diminution des taux de PAI-1. Par ailleurs aucun cas d'acidose lactique n'a été observé sous metformine. Ce traitement ne faisait l'objet dans l'UKPDS d'aucune contre-indication d'ordre cardiologique et les patients qui avaient un angor ou un infarctus poursuivaient leur traitement. Reste l'observation d'une surmortalité cardiovasculaire chez les patients chez qui la metformine a été ajoutée au sulfamide. Pour Turner il s'agit d'un hasard : le nombre de décès observés dans le groupe sulfamide de cette randomisation secondaire a été beaucoup plus faible que dans le groupe total des patients traités par sulfamide.

3ème étape. 

Elle consiste à ajouter un autre traitement, qu'il s'agisse de sulfamides ou d'insuline. Chaque agent thérapeutique, en monothérapie, augmente d'un facteur 2 à 3 la proportion des patients qui obtiennent une hémoglobine glyquée inférieure à 7 % en comparaison avec le régime seul. Toutefois la détérioration de l'équilibre glycémique est telle qu'après 3 ans environ 50 % des patients peuvent atteindre cet objectif avec une monothérapie et qu'après 9 ans, cette proportion diminue à 25 %.



Les implications d'une telle stratégie avec escalade thérapeutique sont les suivantes :

  Les diabétiques de type 2 ont besoin d'une polychimiothérapie incluant 2 ou 3 traitements hypoglycémiants, et très souvent un traitement anti-hypertenseur comportant plusieurs médicaments, un traitement hypolipémiant, de l'aspirine.


A long terme, les patients traités prendront plus de poids que ceux qui ne le sont pas.


L'insuline sera nécessaire chez de nombreux patients, les exposant à une prise de poids et aux hypoglycémies. Il est donc préférable d'utiliser des combinaisons insuline-sulfamide ou insuline-metformine.

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