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Date de la soirée : 20 / 05 / 2003

Date de dernière modification : 14/01/2005

MISE AU POINT sur la dehydroepiandrosterone (DHEA)

Le point sur la DHEA

 Communication du Dr Béatrice Carpentier _ FORUM SANTE GRENOBLE _ 28 / 11 / 2002.

Mise au point sur la DHEA du mardi 20 mai 2003    Dr Nelly WION BARBOT

L'avis du Conseil National de l'Ordre des Médecins. Paris le 10 Avril 2001

La Dehydroépiandrostérone (DHEA) a été découverte dans les urines dès 1934, et isolée dans le plasma humain en 1954. Plus de 50 ans plus tard, son rôle reste mal connu. Elle a connu ces dernières années un succès médiatique sans précèdent, lié à la particularité de sa sécrétion au cours de la vie, ses taux décroissant régulièrement à partir de la troisième décade, pour atteindre moins de 20% du taux maximum au-delà de 70 ans. Cet effondrement de sa sécrétion, alors que celle des autres stéroïdes surrénaliens est maintenue, a conduit à se poser la question de son rôle dans le processus de vieillissement ; rôle qui a eu tendance à être simplifié, via les médias et par le grand public, en une relation de cause à effet, et qui vaut à la DHEA l'étiquette d' « hormone de jouvence ».

1 - BIOSYNTHESE, METABOLISME - MECANISME D'ACTION

La DHEA est un stéroïde à 19 atomes de carbone dérivé du cholestérol, synthétisé dans la zone réticulée de la surrénale. Elle est en interconversion métabolique permanente avec le sulfate de déhydroépiandrostérone (S-DHEA) ; cette forme sulfatée lui confère une plus grande solubilité et une demi-vie plus longue ; elle joue un rôle de « réserve ». Il existe au niveau de multiples tissus des activités enzymatiques susceptibles de convertir la DHEA en androgènes (testostérone et dihydrotestostérone) et oestrogènes (oestradiol et oestrone). Malgré ce rôle de précurseur » des stéroïdes sexuels, le taux de production de DHEA est indépendant du fonctionnement des gonades.

De nombreux travaux ont essayé d'élucider la ou les fonctions physiologiques de la DHEA et de son sulfate; la question reste difficile à résoudre, notamment en absence de modèles animaux : la DHEA n'est secrétée que chez les hommes et les primates supérieurs. Aucun récepteur spécifique à la DHEA n'a été identifié pour l'instant. Aucune fonction vitale ne lui est connue. 

3 mécanismes d'action sont actuellement proposés : 

  • - effets via sa conversion en stéroïdes sexuels 

  • - action cérébrale, en tant que neurostéroïde 

  • - action de modulation de certains paramètres de l'immunité

II - EVOLUTION DE LA SECRETION AVEC L'AGE

Pendant la vie foetale, la surrénale secrète des quantités importantes de DHEA, essentielle à la synthèse d'oestrogènes par le placenta. Après la naissance, la production s'effondre ; pendant l'enfance, jusque 7/8 ans, le taux de DHEA est pratiquement nul ; il augmente à partir de 7 ans (adrénarche).

Une augmentation rapide des taux circulants s'observe pendant la seconde décade ; les taux les plus élevés sont atteints entre 20 et 30 ans, puis décroissent ; ils sont de l'ordre de 20% des taux maximums après l'âge de 70 ans.

Il existe néanmoins de grandes variations inter individuelles, de l'ordre de 1 à 20 pour une même tranche d'âge, ainsi que des variations intra-individuelles spontanées parfois importantes ; la chute des taux n'est pas observée dans 30% de la population.

III - DHEA ET PATHOLOGIES : MODELES ANIMAUX

A noter que la plupart des études ont été menées chez des animaux, qui ne synthétisent pas de façon physiologique cette hormone, ce qui rend difficile l'extrapolation des résultats à l'homme. Par ailleurs, les doses de DHEA administrées au cours de ces expériences sont supra physiologiques.

La DHEA a montré un effet favorisant la perte de poids chez des modèles de rongeurs obèses ; selon les études et les animaux, cette perte de poids est expliquée soit par une modification de la prise alimentaire, soit par l'augmentation de la dépense énergétique.

Chez des rats et souris obèses diabétiques, l'administration de DHEA a amélioré l'insulino-résistance et l'équilibre glycémique.

Elle augmente la densité osseuse chez la rate ovariectomisée.

Chez l'animal, cette hormone a montré des effets immunomodulateurs et anti-inflammatoires.

Elle peut améliorer les fonctions cognitives et la mémoire chez le rat, et réduire son agressivité ; elle a des effets neurotrophiques in vitro.

Elle a un effet inhibiteur de l'apoptose sur les hépatocytes dans des modèles expérimentaux d'hépatites.

Également des effets antitumoraux inhibant le développement de certains cancers induits par des toxiques (cancer du poumon chez la souris, papillomes) ; elle aurait, en administration à long terme, un effet protecteur vis-à-vis du cancer mammaire spontané chez la souris.


IV - DHEA CHEZ L'HOMME

1 - DHEA et âge

Plusieurs phénomènes sont associés au vieillissement : une modification de la composition corporelle, avec réduction de la masse maigre et augmentation de la masse grasse, une ostéopénie, une altération des fonctions supérieures, une réduction de la fonction sexuelle, une asthénie, un accroissement de certaines pathologies : cancers, pathologies cardiovasculaires, pathologies infectieuses. Sur le plan hormonal, le taux de diverses hormones baisse :

  • oestrogènes chez la femme : ménopause

  • androgènes chez l'homme, plus tardivement : andropause

  • hormone de croissance dans les 2 sexes

  • DHEA

Alors que d'autres gardent des taux stables, notamment l'ACTH et les autres stéroïdes surrénaliens.

C'est donc posé la question de la relation entre la baisse du taux de DHEA avec l'âge et le processus de vieillissement. Cette chute est-elle un phénomène délétère ? Peut-on parler d'adrénopause, au même titre que de ménopause ou d'andropause ? Faut-il substituer une déficience ? chez qui ? comment ? De multiples études cliniques ont été menées, avec des objectifs et des méthodologies très variables.

Chez les sujets âgés, l'étude de plus grande envergure est celle menée par les Professeurs Baulieu et Forette, sur 280 hommes et femmes de 60 à 79 ans, qui a montré des effets positifs sur l'état cutané, la libido, et le turn-over osseux de l'administration de 50 mg/j de DHEA pendant 1 an ; mais ces résultats positifs concernaient exclusivement le groupe des femmes de plus de 70 ans.
Les études menées sur l'administration de DHEA et densité minérale osseuse donnent des résultats divergents.
Une étude épidémiologique bordelaise, portant sur 290 sujets de plus de 65 ans, a montré une relation, entre un taux bas de DHEA et le risque de décès dans les 8 ans, uniquement chez les hommes de 65 à 70 ans (RR = 2), et surtout en cas de tabagisme (RR = 6,7) ; est discuté l'effet du tabac sur le taux de DHEA ; les résultats des études menées sont là encore très contradictoires.
D'autres études s'intéressant à la relation entre taux de DHEA et mortalité globale sont en faveur d'une relation inverse chez la femme, et proportionnelle chez l'homme, mais d'autres encore ne trouvent aucune relation.
Une étude a montré que l'administration de DHEA à un groupe de sujets âgés, ayant au départ des taux abaissés, améliore le rapport masse maigre / masse grasse uniquement chez les hommes.
Les études portant sur des groupes de femmes non ménopausées ou chez les hommes jeunes ne montrent aucun bénéfice probant à l'administration de cette hormone.

2 - DHEA et situations de carences avérées

Outre l'âge avancé, où le taux de DHEA est plus ou moins abaissé selon les sujets, il existe 2 situations chez
l'homme dans lesquelles le taux de cette hormone est effondré : l'insuffisance surrénalienne primitive ou secondaire et la corticothérapie prolongée.


L'insuffisance surrénale


3 études ont montré un effet positif d'une substitution par DHEA, chez des insuffisants surrénaux par ailleurs correctement substitués en corticoïdes et minéralocorticoïdes, sur l'humeur, la sensation de bien être, l'asthénie, notamment de fin de journée ; aucun effet n'a été constaté sur la composition corporelle, le métabolisme glucidique et les lipides ;
L'effet sur la minéralisation osseuse et la fonction sexuelle est variable.
Ces effets sont constatés en absence d'élévation significative du taux circulant de testostérone, et constatés chez l'homme comme chez la femme, suggérant une action directe sur le système nerveux central en tant que neurostéroïde.

La corticothérapie

La carence induite en DHEA, via l'inertie corticotrope, pourrait participer aux symptômes attribués à la corticothérapie : symptômes neuropsychiques, perte de masse musculaire, perte de masse osseuse.

3 - DHEA et effets neuropsychiques et psychiatriques

Une synthèse de novo de DHEA a été mise en évidence au niveau cérébral (concentration 6,5 fois supérieure
à celle du plasma) et rend probable son action à ce niveau :
elle fait partie des neurostéroïdes.

Le terme de neurostéroïde désigne des stéroïdes produits au niveau du cerveau, de façon indépendante de la production par les glandes endocrines ; ils ont des actions autocrines et/ou paracrines, modulant la transmission nerveuse. 

Certaines données expérimentales chez l'animal suggèrent pour la DHEA :

  • Un effet antagoniste au niveau des récepteurs de l'acide gamma-amino-butyrique (GABA, neuro-transmetteur inhibiteur).

  • Un effet agoniste sur le récepteur de J'acide N-méthylD-aspartate (acide aminé excitateur).

  • Un effet sur les récepteurs sigma.

Chez l'homme,

  • Certaines études sont en faveur d'une corrélation entre taux de DHEA et santé subjective chez des sujets sains.

  • Les études sur les relations entre taux de DHEA et démence sont contradictoires. L'administration de DHEA n'a pas démontré d'effet sur les performances cognitives.

  • Plusieurs auteurs ont mis en évidence un lien entre taux de DHEA abaissé et symptômes dépressifs ; le sens de la relation, en tant que cause ou conséquence est discuté. Plusieurs études en double aveugle contre placebo ont cependant montré des résultats positifs dans des dépressions modérées et sévères.

L'administration de DHEA semble pouvoir améliorer la sensation de bien être et l'humeur, surtout chez les femmes ménopausées ; les résultats sont négatifs dans des études menées chez des femmes non ménopausées et chez des hommes âgés en bonne santé.4 - DHEA et pathologie cardiovasculaire

Les études sont en faveur d'une association entre concentration basse de DHEA et risque cardiovasculaire chez l'homme, et en faveur d'une relation inverse chez la femme. Une explication possible à ces constatations est liée au devenir métabolique de l'hormone, transformée préférentiellement en estrogènes (protecteurs) chez l'homme et en androgènes (délétères) chez la femme. La majorité des études rapportent une baisse du HDL cholestérol ; d'autres ne constatent pas ce phénomène.

5 - DHEA et tumorigenèse

Les études ayant essayé d'établir une relation entre taux de DHEA et cancer du sein et de l'ovaire sont très discordantes. Une étude suggère que la relation risque de cancer sein / concentration en DHEA est positive en cas de ménopause, ou inverse chez les femmes non ménopausées; donnée semblant confirmée par des données expérimentales chez la rate, et trouvant une explication théorique dans la conversion plus ou moins importante de la DHEA en androgènes. (balance oestrogènes/androgènes ± protectrice selon le statut ovarien)

La DHEA a montré des effets anti-prolifératifs sur certaines lignées de cancers du sein hormonodépendants, et des effets additifs aux anti-oestrogènes.

6 - DHEA et obésité

Les études cherchant à établir une corrélation entre taux de DHEA et BMI sont très divergentes.

Chez l'homme, aucune étude n'a montré d'effet de l'administration de DHEA sur le poids.

Les résultats sont variables et contradictoires sur 1'administration de DHEA et l'insulino-résistance.

7 - DHEA et immunité

- L'administration de DHEA chez des femmes ménopausées et chez des hommes âgés modifie le taux de cellules immunocompétentes et de certaines cytokines, suggérant que cette hormone pourrait jouer un rôle dans le maintien du système immunitaire.

- Les données sur la DHEA administrée en tant que potentialisateur lors de vaccinations chez l'humain sont divergentes ; elle a un effet positif chez la souris.

- Chez le sujet VIH positif, a été mise en évidence relation entre taux bas de DHEA, taux bas de CD4+, stade de la maladie.

- Dans le lupus érythémateux disséminé, l'administration de DHEA améliore l'ensemble des critères d'évolution de la maladie, et permet de réduire les doses corticoïdes.

V - EFFETS SECONDAIRES

A dose présumée restaurer des taux plasmatiques identiques à ceux constatés à 30 ans, soit 50 mg/j aucun effet indésirable aigu grave n'a été rapporté. Des effets androgéniques sont constatés chez plus de 20% des femmes : hirsutisme, hyperséborrhée, acné, chute de cheveux... ce malgré des taux plasmatiques restant dans la normale, et surtout chez la femme ménopausée.

• La DHEA semble favoriser la répartition abdominale des graisses chez la femme, et abaisser le HDL cholestérol, effet potentiellement délétère à long terme sur le plan cardiovasculaire.

• Lors d'une administration à long terme, se pose la question du risque de cancer du sein, et de la prostate.



VI - ADMINISTRATION

La DHEA n'a pas le statut de médicament en France.

En absence de qualification, rien ne s'oppose à sa commercialisation.

Elle est disponible en vente libre sur Internet, ou délivrable en pharmacie, sous forme de préparation magistrale, alors uniquement sur prescription médicale, ce qui est un peu contradictoire avec son statut.

Dans ce cas, le médecin engage directement sa responsabilité quant à l'indication, et le pharmacien quant à la qualité du produit, pour lequel il n'existe pas de contrôle de qualité bien établi.



CONCLUSION

Les expériences menées chez l'animal confèrent à cette hormone des propriétés multiples. Néanmoins, elle n'est produite physiologiquement que chez l'humain, et à un moindre degré chez les primates supérieurs, ce qui ne facilite pas l'exploration de son rôle physiologique, et rend difficile l'extrapolation des résultats de laboratoire. Les études cliniques menées chez l'homme posent le problème de la taille généralement limitée des échantillons, de leur durée (quelques jours à 1 an), de méthodologies variables en qualité, et de grandes divergences dans les résultats.

A qui prescrire de la DHEA ? Comment ?

Actuellement, dans le cadre d'une médecine basée sur les preuves, les données objectives manquent pour répondre à cette question.

Des études complémentaires et à plus long terme sont encore nécessaires pour préciser les bénéfices réels qui peuvent être attendus de cette hormone, mais aussi s'assurer de son innocuité, problème à envisager avec la plus grande circonspection.

Les seuls effets actuellement reproductibles concernent les populations de femmes ménopausées, et peuvent s'expliquer par la conversion de la DHEA en stéroïdes sexuels.

Des études sont en cours pour des pathologies dans lesquelles elle a donné des résultats positifs : l'insuffisance surrénale, le lupus, et la dépression.

 Communication du Dr Béatrice Carpentier _ FORUM SANTE GRENOBLE _ 28 / 11 / 2002.

 

 
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